Pourquoi toutes les affiches de films se ressemblent ?

25 Mar 2025

Tu l’as sûrement déjà remarqué : au cinéma, certaines affiches ont un air de déjà-vu. Un film d’action ? Un mec de dos qui regarde une ville en feu. Une comédie romantique ? Un couple dos à dos qui se chamaille. Un film de science-fiction ? Un fond bleu avec une lueur mystérieuse. Coïncidence ? Pas vraiment. Mais pourquoi diable Hollywood (et les autres) se copient-ils les uns les autres ? Plongeons dans les coulisses du design des affiches de films.

Des codes graphiques qui marchent (et qu’on n’ose pas casser)

L’industrie du cinéma, c’est un business. Et comme tout bon business, on ne prend pas trop de risques quand une recette fonctionne. Le but d’une affiche ? Te dire instantanément dans quelle case ranger le film. les codes graphiques, ça rassure. Ça te permet en un coup d’œil de comprendre le genre du film

ARTICLE_31_INCEPTION

Le bleu/orange pour les blockbusters → Ce contraste tape à l’œil et évoque l’action, le danger et l’épique (ex : Inception, Transformers, Edge of Tomorrow…).

Le jaune vif pour les comédies → Ça attire l’œil et ça fait « fun » (La La Land, Crazy Stupid Love, Little Miss Sunshine…)

Le noir et blanc + un personnage triste → C’est du sérieux, ça parle d’histoire, de biopic ou de drame profond (Lincoln, Le Discours d’un Roi, Bohemian Rhapsody…).

Les têtes flottantes → Si une affiche est remplie de visages en gros plan, c’est que les producteurs veulent que tu vois les stars avant tout (Marvel, Harry Potter, Star Wars…).

L’affiche “silhouette minuscule face à un décor immense” → Très populaire pour les films de science-fiction ou d’aventure, ce type d’affiche joue sur l’échelle pour souligner l’immensité d’un monde ou d’un enjeu (Interstellar, The Revenant, Dune…).

ARTICLE_31_HER

L’affiche “texte géant sur fond minimaliste” → Utilisée pour les thrillers ou films d’auteur, elle met tout sur le titre et un élément visuel ultra-simple (The Social Network, Her, Parasite…).

L’influence du marketing : les algorithmes décident pour nous

Autre raison pour laquelle tout se ressemble : le bon vieux marketing. Les studios ne se contentent plus de faire une belle affiche, ils la testent. Et comment ? Avec des tonnes de focus groups et d’analyses de données. Ils prennent 10 affiches, testent laquelle fait le plus cliquer, et hop, celle qui marche le mieux devient le modèle à suivre.

Résultat : toutes les affiches finissent par se ressembler, car elles sont optimisées pour plaire au plus grand nombre. Ce n’est pas une question d’originalité, mais d’efficacité.

Marvel et le copier-coller des affiches

ARTICLE_31_MARVEL

Si on parle d’affiches qui se ressemblent, impossible de passer à côté des films Marvel. Avec une Si on parle d’affiches qui se ressemblent, impossible de passer à côté des films Marvel. Avec une trentaine de films au compteur, le studio a trouvé une recette qui marche… et ne l’a plus jamais lâchée.

Regarde bien : sur presque toutes les affiches, on retrouve la même composition :

  • Le héros au centre, dans une pose héroïque, torse bombé, regard déterminé vers l’horizon (probablement en train de réfléchir à une punchline badass).
  • Les alliés autour, disposés en diagonale ou en cercle, chacun dans une posture ultra-dramatique, arme dégainée ou pouvoir en pleine activation.
  • Le méchant en fond, souvent énorme, dominant tout le monde, avec une expression de « moi grand méchant, moi tout casser ».
  • Un ciel dramatique, parce qu’une explosion, des éclairs ou une faille interdimensionnelle, c’est quand même plus classe qu’un simple coucher de soleil.

Que ce soit Avengers, Thor, Doctor Strange, Black Panther, Captain Marvel ou même les Gardiens de la Galaxie, la mise en scène est toujours la même. Et ce n’est pas un hasard : cette composition est efficace. Elle donne une impression d’action et d’enjeu épique, tout en mettant bien en avant les visages des stars du film (parce que bon, il faut bien rentabiliser le cachet de Robert Downey Jr.).

Le plus drôle, c’est que si tu mets plusieurs affiches côte à côte et que tu échanges les personnages, ça fonctionne quand même. On pourrait presque imaginer un générateur automatique d’affiches Marvel : tu choisis ton héros, tes sidekicks, ton méchant en arrière-plan, tu ajoutes quelques éclairs et… BAM, affichage prêt à l’emploi !

Alors, est-ce que ça manque d’originalité ? Oui.
Est-ce que ça fonctionne ? Clairement.
Est-ce que ça commence à devenir un poil répétitif après 30 films ? On te laisse deviner.

Les contraintes techniques et les délais serrés

Les graphistes qui bossent sur les affiches ont rarement carte blanche. Ils doivent jongler avec :

  • Les exigences du studio : “Fais-nous une affiche qui ressemble à Marvel, mais en différent”
  • Les délais ridicules : Parfois, ils ont quelques jours pour pondre une affiche qui va être vue par des millions de personnes
  • Les stars et leurs egos : Certains acteurs exigent que leur visage soit plus grand que celui des autres.

Avec autant de contraintes, difficile de révolutionner le game.

Quelques affiches qui ont osé être différentes (et ça fait du bien !)

Heureusement, certains films sortent du lot avec des affiches originales. Comme quoi, quand on ose sortir des sentiers battus, on marque les esprits. Quelques exemples :

ARTICLE_31_2001

2001: A Space Odyssey (1968) → L’affiche qui annonce la SF moderne. Une station spatiale flottant dans l’espace, accompagnée d’une typographie blanche ultra-épurée.

Jaws (1975) → Un requin immense surgissant sous un nageur inconscient, une image ultra-simple mais terrifiante.

Metropolis (1927) → L’affiche qui a défini le design futuriste. Une composition Art déco sublime, avec un immense gratte-ciel et une silhouette robotique dorée.

Blade Runner (1982) → Une affiche peinte façon néo-noir, avec Harrison Ford en haut, une femme fatale en contrebas et un décor cyberpunk noyé dans la brume.

Moonlight (2016) → Un montage subtil des trois acteurs jouant le même personnage à différents âges, en trois teintes distinctes, reflétant l’évolution de son identité.

ARTICLE_31_APOCALYPSE_NOW

Apocalypse Now (1979) → Le visage spectral de Marlon Brando flottant dans un ciel infernal, avec des hélicoptères noirs en contrebas. Une affiche qui transpire la folie et le chaos de la guerre du Vietnam.

Alien (1979) → Un œuf fissuré avec une lumière verte inquiétante, suggérant plus qu’il ne montre.

ARTICLE_31_PARASITE

Parasite (2019) → Une composition graphique intrigante avec des bandeaux noirs sur les yeux des personnages.

The Lobster (2015) → Un jeu graphique absurde et dérangeant qui colle au ton du film.

ARTICLE_31_FACEBOOK

The Social Network (2010) → Un gros texte qui prend tout l’espace, au lieu d’un montage de visages.

ARTICLE_31_BIRDMAN

Birdman (2014) → Une illustration minimaliste avec une tête d’oiseau dessinée dans le crâne de Michael Keaton, symbolisant la folie et la dualité du personnage.

ARTICLE_31_ENNEMY

Enemy (2013) → La tête de Jake Gyllenhaal qui se transforme en skyline avec une araignée géante… troublant et intrigant.

Alors, on fait quoi ?

Si toutes les affiches se ressemblent, c’est parce que les studios jouent la sécurité. Les codes sont efficaces, les tests marketing imposent leur loi et les contraintes techniques n’aident pas. Après tout, si une recette fonctionne et attire le public, pourquoi la changer ? Mais ça ne veut pas dire qu’on doit se résigner à voir toujours les mêmes visuels copier-coller d’un film à l’autre.

Il faut dire aussi que ce sont souvent les mêmes entreprises qui conçoivent les affiches des blockbusters. Des agences spécialisées, qui bossent à la chaîne, en suivant des directives ultra-précises dictées par les studios. Pas étonnant qu’on retrouve toujours les mêmes compositions, les mêmes palettes de couleurs et les mêmes têtes flottantes. Pourquoi prendre le risque de faire appel à des artistes indépendants, libres de toute créativité ?

Heureusement, certains designers et studios osent encore casser les codes, comme @ItsNameJr, l’artiste derrière les sublimes affiches d’Arcane. Des visuels qui respirent la personnalité et l’originalité, loin des templates standardisés. Et parfois, ces affiches marquent tellement les esprits qu’elles influencent l’industrie et prouvent qu’on peut faire autrement.

D’ici là, amuse-toi à repérer les clichés sur les affiches de cinéma. La pose héroïque du protagoniste ? Check. Le méchant en arrière-plan avec un regard menaçant ? Check. Le fameux bleu et orange omniprésent ? Check. C’est presque devenu un jeu à part entière, un bingo des affiches de films. Et qui sait, peut-être que la prochaine révolution visuelle viendra d’un artiste indépendant… à condition qu’on lui laisse sa chance.

ARTICLE_31_DUNE